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Chroniques vénitiennes 2024

Nous avons quitté Nice sous la pluie pour passer quelques jours dans l’émerveillement ensoleillé et costumé de Venise. 
À peine arrivés, on redécouvre les tenues de plus en plus somptueuses des vénitiens. Pour la plupart, elles font référence à l’histoire : vêtements du XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles prédominants, ou issus de commedia dell’Arte et de tableaux d’histoire, mais aussi des déguisements provenant de films de science-fiction (Starwars) ou d’aventure (pirate des Caraïbes).


Un petit groupe très orignal a choisi comme thème la couleur, belle idée. 


Tous ces gens maquillés, chapeautés, masqués posent volontiers pour les photographes dont les groupes se font et se défont rapidement. Cette chasse non violente, sympathique, polie (tous se remercient) est en elle-même le cœur du carnaval. 


Sur le podium érigé place Saint Marc, face à la plus belle des cathédrales, on peut y voir des attractions (musiciens, jongleurs et comédiens), mais l’attention est plutôt retenue par la déambulation des personnes costumées – spécificité du Carnaval de Venise. 


Bien sûr, les rues sont vite bondées, il ne faut pas être pressé. On suit les gens costumés dont la tradition depuis le moyen-âge est de marcher lentement et de s’arrêter pour se prêter au regard de qui voudra. Depuis l’avènement du portable et de photographies faciles à faire et à archiver, des millions de millions de photos sont prises à chaque carnaval. La Piazza San Marco, cœur de Venise, la piazzeta, la riva des schiavoni et le pont sont noirs de monde, noirs avec des milliers de taches de couleurs qui se baladent suivies par des hordes de photographes.  


Se balader dans Venise, c’est admirer ses adorables ruelles bordées de briques d’un rouge indéfinissable, les campos, les rios, les fondamenta (quai bordant les canaux), les centaines de ponts à franchir, les églises, toutes plus belles les unes que les autres et remplies de merveilles peintes et sculptées, les palais aux arches trilobées, et bien sûr les musées. Grâce à Gabriella, une belle rencontre vénitienne, nous avons découvert le plus bel hôpital du monde avec sa Schola San Marco et son époustouflant plafond à caissons dorés.


Paradoxes de Venise, une exposition de Marcel Duchamp chez Peggy Guggenheim (enterrée dans le jardin de son palais) a été un enchantement. Sa vision d’une grande acuité sur l’art de XXe siècle a remis en question la plupart de ses problématiques : le déplacement du regard, le statut de l’artiste, celui de l’œuvre d’art, les installations signifiantes, l’utilisation des jeux de mots, etc. Cette exposition d’une soixantaines d’œuvres sur différents supports, à différentes échelles et en éditions limitées, redéfinit ce qui constitue une œuvre d’art et, par extension, l’identité de l’artiste. 

Offrant des formes comparables de plaisir esthétique, la copie est pour Duchamp aussi importante que l’original. De la Joconde moustachue à la remarquable Boîte en Valise, le musée portatif de ses œuvres réunies dans une petite valise, l’exposition « Marcel Duchamp et l’attrait de la copie » présente 69 reproductions de ses principales œuvres. Ses photographies, lithographies, répliques miniatures de ses ready-made comme Fontaine ou le modèle réduit du Grand Verre, nous montrent l’étendue de son inventivité et combien il nous nourrit encore.

Venise, ce sont des lieux insolites, comme ce petit Casino Venier devenu le siège de l’Alliance Française. Nous l’avons découvert grâce à Gabriella, fine connaisseuse de lieux insolites et secrets. Dans cet adorable ridotto, petite maison accueillante d’après spectacle, étaient pratiqués les jeux de hasard, une sorte de club où on venait danser, discuter politique, retrouver des amis et pourquoi pas, faire des rencontres galantes.
Son agencement reproduit la typologie des palais vénitiens : un salon central et deux pièces admirablement décorées : sols en mosaïque vénitienne, des murs couverts de stucs, des miroirs, des portes en palissandre avec poignées et serrures de bronze. Dans le salon, un judas dans le pavement permet de surveiller ceux qui veulent entrer. Un liago, petit balcon en fer forgé, porte le blason des Venier. 


Se balader dans Venise, c’est admirer également les immenses et magnifiques palais aux salles de réception pouvant accueillir des centaines de personnes. Leurs façades aux grandioses fenêtres trilobées, merveilles de légèreté, dévoilant des rideaux écarlates, des lustres étincelants et des plafonds dorés vénito-byzantins. gothiques, renaissants, baroques ou néo-classiques, des palais aux pieds dans l’eau qui ont traversé les siècles. 

Venise des galeries tape à l’œil (Contini, Ravignan..), mais aussi des petites galeries présentant des expositions originales d’artistes contemporain. Au cœur de ghetto, Vision Altre, ayant choisi comme thème : « War/Guerra » expose les peintures et sculptures d’une cinquantaine d’artistes internationaux dont notre célèbre antiboise Véronique Champollion (ci-dessous au centre).


Une autre exposition : Caigo Venetian Fog, à la galerie Kunst Depot met en scène Venise dans la brume grâce aux photos de Andy Parker. Elle était fermée mais nous avons pu la voir de l’extérieur. Coup de chance, le lendemain, nous avons pu nous mêmes admirer et prendre nos photos de Venise dans la brume, toujours plus mystérieuse de jour comme de nuit, magique, semblant émerger d’un rêve.


À la Fondation Wilmotte, c’est Venise sous la neige (à différentes périodes) vue à travers le regard de plusieurs artistes. C’est assez rare, mais les photographes n’ont pas manqué d’immortaliser ses toits, ses places, ses trottoirs couverts de blanc, les traces de pas dans la neige et ses pigeons étonnés. Une série remarquable de photos prouvant que Venise reste toujours belle sous la neige, la brume, au soleil, au crépuscule ou la nuit…


Jolis restaurants intimistes, promenades proposées par le guide d’Hugo Pratt dans des ruelles inconnues s’ouvrant sur des campis aux murs couverts de symboles cabalistiques, ainsi que des portiques mystérieux et de vieilles chapelles…, la découverte de Venise est infinie. 

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